La rénovation des copropriétés, et spécialement la rénovation énergétique des immeubles des 30 glorieuses, est un sujet complexe, tant sur le plan technique que réglementaire ou financier. SOCATEB, entreprise d’Ile-de-France spécialisée dans le ravalement technique et thermique, est au coeur de cette problématique à la croisée de compétences multiples. Le point sur les facteurs-clés d’une rénovation thermique réussie avec Irène Demoute, directrice commerciale chez SOCATEB.
Que représente le marché des copropriétés pour SOCATEB ?
SOCATEB est une entreprise familiale fondée en 1981 et située à Orly. Notre activité est donc centrée sur la grande région parisienne. SOCATEB regroupe 5 pôles d’expertises complémentaires : l’enveloppe du bâtiment, avec une spécialité dans le ravalement technique ; l’isolation thermique par l’extérieur et bardage, bardage ; l’étanchéité des toitures et des – terrasses, le traitement de l’amiante, en façade et la serrurerie (garde-corps, …). SOCATEB réalise près de 60% de son chiffre d’affaires sur des chantiers de copropriétés, mais également avec des bailleurs sociaux et des institutionnels.
Comment penser la rénovation énergétique d’une copropriété ?
Pour la partie qui nous concerne – le ravalement – le décret de du 30 mai 2016 a considérablement modifié l’approche des travaux de ravalement, en imposant, à quelques exceptions près, la réalisation de travaux d’isolation thermique dès lors qu’un bâtiment fait l’objet de travaux de ravalement importants sur des parois de locaux chauffés donnant sur l’extérieur, représentant au moins 50 % d’une façade du bâtiment, hors ouvertures.
L’approche de la rénovation thermique a donc été profondément changée, tant de notre côté (puisque nous embarquons désormais des travaux d’isolation de manière quasi-systématique) que du côté des copropriétés, qui doivent repenser ces travaux qui, au départ, pouvaient n’être qu’à finalité technique et esthétique .
Dans notre branche, les dossiers qui nous parviennent pour la réalisation des travaux sont, dans 80% des cas, pilotés par une maitrise d’œuvre (architectes, bureau d’études…) sur le plan technique, qui a déjà préparé le projet en amont avec le syndic et les copropriétaires. Mais nous avons encore beaucoup d’appels directs de maîtres d’ouvrages ou de syndics qui souhaitent obtenir un devis pour un ravalement. Dans ce cas, nous devons les conseiller sur les bonnes démarches à suivre.
En effet, il faut bien comprendre qu’une opération de ravalement va nécessiter de se poser la question des travaux embarqués d’isolation thermique : les copropriétaires les ont-ils intégrés dans la démarche, tant sur le plan technique que (surtout) financier ? C’est la raison pour laquelle nous faisons en sorte qu’ils prennent la problématique dans le bon sens, et les incitons à faire réaliser un audit ou un diagnostic complet de la copropriété. Opération qui nécessite déjà une première approbation de l’AG des copropriétaires, et d’engager des frais avant les premiers travaux.
Dans la mesure où la plupart des copropriétés n’ont qu’une seule AG par an, on comprend que le processus peut rapidement s’allonger. Cette première phase va permettre aux copropriétaires d’avoir un bilan ou un audit thermique de leur bien, ainsi que la classe énergétique de leur immeuble. Donc généralement, entre l’idée de rénovation d’une façade et l’engagement des travaux, il peut se passer 3 ou 4 ans, voire plus.
Quels sont les arguments à la disposition du syndic qui vont « faire mouche » auprès des copropriétaires ?
Tout d’abord, il y a l’argument réglementaire : embarquer des travaux de rénovation thermique dans le cadre d’une opération de ravalement est obligatoire. Beaucoup de dossiers qui nous parviennent et qui comprennent des travaux de rénovation thermique ont initialement été retoqués par les municipalités car celles-ci sont vigilantes quant au respect de cette obligation. Mais ce « surcoût » peut parfois freiner les copropriétaires pour la réalisation du ravalement, et les faire renoncer à l’opération.
Ensuite, il y a l’argument du confort thermique généré par les travaux d’isolation, qui vont générer une amélioration du cadre de vie et du confort quotidien des occupants. Ici, on ne parle plus de retour sur investissement ou de plus-value, mais bien de quelque chose qui est perceptible dès réception des travaux. Le corollaire de ce confort, c’est la diminution de la facture énergétique. Là encore, l’effet est quasiment immédiat : un habitat bien isolé, ce sont des occupants qui voient leurs charges baisser.
Un autre argument imparable, selon la situation de l’immeuble, c’est le risque de perte de valeur à la revente, quand d’autres immeubles neufs se sont construits, ou vont se construire aux alentours. Ces immeubles neufs sont aux normes, avec une étiquette énergétique A ou B, alors que la copropriété à rénover se positionne en classe E ou F… ce qui peut rebuter les acheteurs.
Enfin, un argument peut emporter la décision : les aides financières, comme les crédits d’impôts, les Certificats d’Économies d’Énergie, ou les aides directes de l’ANAH ou de l’ADEME dont chacun des copropriétaires pourra bénéficier. C’est là que l’ingénierie financière prend toute son importance.
Ce que l’on constate, par contre, c’est que l’argument écologique et la diminution de l’empreinte carbone, ne font pas mouche face aux frais à engager.
Quel est donc le planning d’une rénovation réussie ?
Les dossiers qui aboutissent sont ceux qui ont été préparés en amont avec les différentes personnes compétentes, à savoir, l’équipe de maîtrise d’œuvre, le syndic et les conseils syndicaux sur l’ensemble du projet, et pas uniquement sur les aspects techniques et esthétiques. Il faut également intégrer l’ingénierie financière. Par ailleurs, des réunions d’informations seront indispensables pour présenter le projet aux copropriétaires.
La première étape, c’est la motivation du projet et l’existence d’une « locomotive » qui va le tirer jusqu’au bout. Ce sera généralement l’équipe composée du conseil syndical et du syndic. C’est elle qui va convaincre les copropriétaires que le bâtiment a vécu, qu’il faut le ravaler et, par conséquent, y embarquer des travaux. A ce stade, le maitre d’ouvrage doit envisager de faire voter la réalisation d’un bilan ou d’un diagnostic thermique.
La deuxième étape, c’est de faire appel à une maîtrise d’œuvre qui va proposer des « scénarios de travaux » cohérents, en recommandant la solution la plus adaptée. A ce stade, le budget est connu dans ses grandes lignes, et l’ingénierie financière peut entrer en lice. C’est elle qui va indiquer les aides déblocables collectivement et individuellement (Il s’agit de calculs personnalisés par appartement en fonction du revenu fiscal du copropriétaire). A ce stade, on se situe généralement deux ans après le lancement de l’idée.
La troisième étape consiste à réaliser des appels d’offres auprès des entreprises. Au cours cette année, on commence à présenter les financements de l’opération. L’ingénierie financière se charge de collecter les aides (ANAH , CEE…) et de trouver des subventions pour faciliter le financement auprès d’acteurs tels que : la région Ile de France, l’ADEME ile de France etc.. Par ailleurs, elle peut également réaliser des dossiers de prêts pour le reste-à-charge.
Enfin, la quatrième année sera celle du démarrage des travaux si ceux-ci sont votés lors de l’assemblée générale. Rappelons que chaque décision fait l’objet d’un vote.
Mais ce phasage n’est pas une recette-miracle : chaque copropriété est un cas particulier qui nécessite une étude spécifique. L’important est de prendre le temps et d’y consacrer les ressources nécessaires.